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Les personnes publiques et la lutte contre le travail dissimulé : comment contrôler les contrôleurs ?


Poussé par un constat d’échec (rapport Warsmann sur la qualité et la simplification du droit, du 29 janvier 2009), le législateur a récemment renforcé le dispositif de lutte contre le travail dissimulé dans les contrats publics par sa loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.


Précédemment, les mesures étaient trop limitées dans leur portée. Désormais, le nouvel article L. 8222-6 du code du travail, qui s’applique à « tout contrat écrit » conclu par les personnes publiques avec un cocontractant (marchés publics, conventions de délégation de service public, contrats de partenariat, concessions de travaux ou simples conventions d’occupation du domaine public), fournit une arme aux cocontractants publics pour mieux lutter contre le travail dissimulé. Ils disposent désormais de deux instruments pour sanctionner leurs cocontractants infracteurs. L’efficacité du nouveau dispositif réside néanmoins davantage dans les mesures incitatives.

Renforcement des sanctions encourues par le cocontractant

En plus de la résiliation du contrat aux torts du titulaire, qui existait avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2011-525, les personnes publiques peuvent appliquer des pénalités contractuelles à leur cocontractant.

Les personnes de droit public doivent veiller à ce que les contrats publics qu’elles concluent comporte une clause « stipulant que des pénalités peuvent être infligées au cocontractant s’il ne s’acquitte pas des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 à L. 8221-5 » du code du travail (défaut d’immatriculation de l’employeur ; défaut de déclaration aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale).

La personne publique est tenue d’ouvrir une procédure de sanction lorsqu’elle est informée de l’irrégularité par un agent de contrôle :
- elle doit enjoindre au titulaire de régulariser sa situation ;
- elle doit transmettre à l’agent de contrôle la réaction, active ou passive, du titulaire à cette injonction ;
- elle doit informer l’agent de contrôle du défaut de régularisation ;
- elle peut, si son injonction n’est pas suivie d’effet, appliquer les pénalités contractuelles ou résilier le contrat, sans indemnité, aux frais et risques du titulaire.

La personne publique a des obligations à l’égard de l’agent de contrôle alors que le prononcé d’une sanction n’est qu’une option qui lui est ouverte.

Le montant des pénalités ne peut être supérieur à 10% du montant du contrat et ne peut pas excéder le montant des amendes pénales encourues pour les mêmes faits (articles L. 8224-1, L. 8224-2 et L. 8224-5 du code du travail).

La clause peut durcir la procédure en la rendant plus efficace. Ainsi, alors qu’il est imposé à la personne publique d’entrer dans le processus de sanction lorsque elle est informée par un agent de contrôle de la situation irrégulière, il lui est loisible de prévoir que ces sanctions seront appliquées lorsqu’elle en prend connaissance par d’autres biais. Alors qu’il lui est laissé le soin d’apprécier si des pénalités doivent être appliquées, la clause peut fixer un déclenchement de plein droit, en cas d’absence de régularisation ou d’absence de réponse. Enfin, alors que le code du travail laisse le choix entre deux types de sanctions prévus (pénalités ou résiliation), le contrat peut prévoir une gradation des sanctions contractuelles.

Des mesures incitatrices, gage d’efficacité

Si la personne publique n’a pas fait l’injonction qu’elle devait après avoir été informée de l’irrégularité de la situation du titulaire ou si elle n’a pas tenu informé l’agent de contrôle de la réponse ou de l’absence de réponse du titulaire indélicat ou si elle n’a pas informé l’agent de contrôle, dans le délai réglementaire, de l’absence de correction des irrégularités, elle « est tenue solidairement responsable des sommes dues au titre des 1° et 3° de l'article L. 8222-2, dans les conditions prévues à l'article L. 8222-3. ».

La fin des attestations sur l’honneur

Lors des travaux parlementaires, le gouvernement s’est engagé à alléger par décret le régime des attestations semestrielles prévu à l’article D. 8222-5 du code du travail (attestations sur l’honneur du dépôt auprès de l’administration fiscale des déclarations fiscales obligatoires et de la réalisation du travail par des salariés employés régulièrement).

Le récent dispositif de mai dernier est une nouvelle illustration de la permanente dynamique de conciliation entre l’enjeu de la régularité de l’emploi pour l’exécution des contrats publics et l’indispensable baisse des charges budgétaires.

Les collectivités sont invitées à être moins pudiquement hypocrites sur les prix très attractifs qui leurs sont proposés pour les prestations fortement consommatrices de main d’œuvre, par exemple pour les services de nettoiement.

Elles sont confrontées, désormais, au risque de devoir subir deux inconvénients alternatifs si leur vigilance a été abaissée en phase de passation : devoir gérer la prise en otage par le titulaire de la satisfaction de leurs besoins ou devoir supporter une charge financière supplémentaire.


Article publié sur le site Achatpublicinfo.

Rédigé par Laurent-Xavier Simonel et Benjamin Touzanne le Mercredi 19 Octobre 2011

        

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