Pour rappel, les conventions de forfait-jours, instaurées par la loi Aubry II du 19 janvier 2000 dans le cadre de la mise en place de la réduction du temps de travail, puis complétées par les lois du 2 aout 2005 et du 20 aout 2008, proposent un décompte, en nombre de jours travaillés dans l’année fixé, pour le salarié qui dispose d'une autonomie dans l'organisation de son emploi du temps et dont la nature des fonctions ne le conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l’entreprise.
Ce mécanisme supprime ainsi la problématique relative au calcul des heures supplémentaires.
Dans cet arrêt, un salarié cadre autonome soumis a une convention de forfait-jours telle que prévue par l’accord sur l’organisation du travail du 28 juillet 1998 dans la branche de la métallurgie, soutenait que l’employeur avait manqué à ses obligations découlant dudit accord qui lui imposaient d’établir un document de contrôle des journées et demi journées de travail, de temps de repos et congés ainsi que d’assurer un suivi régulier de l’organisation et de la charge de travail du salarié.
Il réclamait alors le paiement des heures supplémentaires considérant que la convention de forfait-jours n’était pas valable.
La chambre sociale, au visa d’un nombre impressionnant de normes nationales, constitutionnelles et européennes a confirmé le principe de validité de la convention de forfait-jours tout en prenant soin de poser les conditions qui l’encadrent.
Ce mécanisme supprime ainsi la problématique relative au calcul des heures supplémentaires.
Dans cet arrêt, un salarié cadre autonome soumis a une convention de forfait-jours telle que prévue par l’accord sur l’organisation du travail du 28 juillet 1998 dans la branche de la métallurgie, soutenait que l’employeur avait manqué à ses obligations découlant dudit accord qui lui imposaient d’établir un document de contrôle des journées et demi journées de travail, de temps de repos et congés ainsi que d’assurer un suivi régulier de l’organisation et de la charge de travail du salarié.
Il réclamait alors le paiement des heures supplémentaires considérant que la convention de forfait-jours n’était pas valable.
La chambre sociale, au visa d’un nombre impressionnant de normes nationales, constitutionnelles et européennes a confirmé le principe de validité de la convention de forfait-jours tout en prenant soin de poser les conditions qui l’encadrent.
Pourquoi cet arrêt était-il tant attendu ?
Depuis de récentes décisions rendues par le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe (dont la mission est de vérifier la bonne application de la Charte sociale européenne par les Etats signataires), un avenir douteux planait sur la convention de forfait-jours.
En effet, le Comité européen des droits sociaux avait émis de vives critiques concernant la validité de ce dispositif singulier à la France, en considérant que l’article 2§1 de la Charte était mis à mal par notre droit du travail en ce que le système des forfaits-jours portait atteinte à l’engagement des Etats de fixer une durée raisonnable du travail journalier et hebdomadaire et de proposer un cadre juridique offrant des garanties suffisantes pour les salariés. (CEDS, 23 juin 2010)
La pratique révélait que le cadre soumis au mécanisme du forfait-jours pouvait effectuer jusqu’à 78 heures de travail par semaine.
Les regards se sont donc penchés sur l’arrêt commenté : la Haute Cour allait-elle ou non recevoir les critiques émanant du Comité européen et remettre en cause la validité du système du forfait-jours?
En effet, le Comité européen des droits sociaux avait émis de vives critiques concernant la validité de ce dispositif singulier à la France, en considérant que l’article 2§1 de la Charte était mis à mal par notre droit du travail en ce que le système des forfaits-jours portait atteinte à l’engagement des Etats de fixer une durée raisonnable du travail journalier et hebdomadaire et de proposer un cadre juridique offrant des garanties suffisantes pour les salariés. (CEDS, 23 juin 2010)
La pratique révélait que le cadre soumis au mécanisme du forfait-jours pouvait effectuer jusqu’à 78 heures de travail par semaine.
Les regards se sont donc penchés sur l’arrêt commenté : la Haute Cour allait-elle ou non recevoir les critiques émanant du Comité européen et remettre en cause la validité du système du forfait-jours?
Quelle est la position de la Cour de cassation ?
La Haute juridiction pose trois principes : après avoir rappelé que « le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles », elle précise que « les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur ».
Enfin, et concernant la convention de forfait jour en elle-même, la Cour considère que « toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires».
Sans remettre en cause la validité du forfait-jours, cet arrêt pose le cadre juridique qui encadre son exécution : la convention de forfait-jours doit être prévue par un accord collectif, qui doit lui-même s’efforcer de prévoir les garanties concrètes d’application du forfait-jours pour assurer le respect des impératifs liés à la durée du travail et au temps de repos ainsi que les modalités de suivi et de contrôle du travail du salarié. (I)
De plus, et c’est là que réside certainement l’apport le plus significatif de la décision, la Haute Cour prévoit désormais une sanction au non respect de la convention collective par l’employeur, le forfait-jours étant alors privé d’effet. (II)
Enfin, et concernant la convention de forfait jour en elle-même, la Cour considère que « toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires».
Sans remettre en cause la validité du forfait-jours, cet arrêt pose le cadre juridique qui encadre son exécution : la convention de forfait-jours doit être prévue par un accord collectif, qui doit lui-même s’efforcer de prévoir les garanties concrètes d’application du forfait-jours pour assurer le respect des impératifs liés à la durée du travail et au temps de repos ainsi que les modalités de suivi et de contrôle du travail du salarié. (I)
De plus, et c’est là que réside certainement l’apport le plus significatif de la décision, la Haute Cour prévoit désormais une sanction au non respect de la convention collective par l’employeur, le forfait-jours étant alors privé d’effet. (II)
I. La vigueur de la négociation collective
« Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires ».
La Cour de cassation réaffirme, au moyen d’un attendu de principe, celui selon lequel la convention de forfait-jours doit être expressément autorisée par un accord collectif.
Toutefois, l’accord ne peut se contenter de prévoir simplement la possibilité de recourir au mécanisme du forfait-jours mais doit impérativement prévoir des stipulations assurant le respect des durées maximales de travail ainsi que des repos et prévoir les modalités de suivi de l’organisation et de la charge de travail du salarié.
Il convient ici de noter que l’arrêt se réfère à l’ancien article L.3121-45 du Code du travail, issu de la loi du 19 janvier 2000, applicable aux faits de l’espèce et selon lequel la convention collective doit prévoir les catégories de cadres intéressés au regard de leur autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps, les modalités de décompte des journées et demi journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos, les conditions de contrôle de son application, des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés, de l’amplitude de leurs journées d’activité et de la charge de travail qui en résulte.
C’est par l’examen minutieux de l’accord collectif applicable au litige, à savoir celui de la métallurgie, que la Haute juridiction considère qu’il offre bien les garanties requises quant au respect des durées maximales de travail ainsi que des repos.
Une place considérable est alors conférée à la négociation collective et les partenaires sociaux détiennent un rôle clé.
En effet, ces derniers doivent s’interroger et s’entendre, en amont, sur les conditions d’application des conventions de forfait-jours, qui comprennent notamment les modalités de suivi et de surveillance des jours travaillés par le salarié et qui se matérialisent par un entretien entre ce dernier et son employeur afin d’évoquer l’organisation et la charge de travail de l’intéressé et l’amplitude de ses journées d’activité, étant précisé que cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé.
La Cour précise le contenu de cet accord, et rappelle méthodiquement que : « l’article 14 de l’accord du 28 juillet 1998 sur l’organisation du travail dans la métallurgie, le forfait en jours s’accompagne d’un contrôle du nombre de jours travaillés, afin de décompter le nombre de journées ou de demi-journées travaillées, ainsi que celui des journées ou demi-journées de repos prises ; que l’employeur est tenu d’établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification des jours de repos en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail ; que ce document peut être tenu par le salarié sous la responsabilité de l’employeur ; que le supérieur hiérarchique du salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours assure le suivi régulier de l’organisation du travail de l’intéressé et de sa charge de travail ; qu’en outre, le salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours bénéficie, chaque année, d’un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l’organisation et la charge de travail de l’intéressé et l’amplitude de ses journées d’activité ; que cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé. »
Dès lors, il est permis de penser que, sans imposer formellement aux partenaires sociaux de négocier leur accord collectif en parfaite conformité avec celui de la métallurgie, celui-ci pourrait servir de « référence » dans la conduite des prochaines négociations afin de s’assurer que l’accord ne pourra faire l’objet d’une censure de la Cour de cassation.
La Cour de cassation réaffirme, au moyen d’un attendu de principe, celui selon lequel la convention de forfait-jours doit être expressément autorisée par un accord collectif.
Toutefois, l’accord ne peut se contenter de prévoir simplement la possibilité de recourir au mécanisme du forfait-jours mais doit impérativement prévoir des stipulations assurant le respect des durées maximales de travail ainsi que des repos et prévoir les modalités de suivi de l’organisation et de la charge de travail du salarié.
Il convient ici de noter que l’arrêt se réfère à l’ancien article L.3121-45 du Code du travail, issu de la loi du 19 janvier 2000, applicable aux faits de l’espèce et selon lequel la convention collective doit prévoir les catégories de cadres intéressés au regard de leur autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps, les modalités de décompte des journées et demi journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos, les conditions de contrôle de son application, des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés, de l’amplitude de leurs journées d’activité et de la charge de travail qui en résulte.
C’est par l’examen minutieux de l’accord collectif applicable au litige, à savoir celui de la métallurgie, que la Haute juridiction considère qu’il offre bien les garanties requises quant au respect des durées maximales de travail ainsi que des repos.
Une place considérable est alors conférée à la négociation collective et les partenaires sociaux détiennent un rôle clé.
En effet, ces derniers doivent s’interroger et s’entendre, en amont, sur les conditions d’application des conventions de forfait-jours, qui comprennent notamment les modalités de suivi et de surveillance des jours travaillés par le salarié et qui se matérialisent par un entretien entre ce dernier et son employeur afin d’évoquer l’organisation et la charge de travail de l’intéressé et l’amplitude de ses journées d’activité, étant précisé que cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé.
La Cour précise le contenu de cet accord, et rappelle méthodiquement que : « l’article 14 de l’accord du 28 juillet 1998 sur l’organisation du travail dans la métallurgie, le forfait en jours s’accompagne d’un contrôle du nombre de jours travaillés, afin de décompter le nombre de journées ou de demi-journées travaillées, ainsi que celui des journées ou demi-journées de repos prises ; que l’employeur est tenu d’établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification des jours de repos en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail ; que ce document peut être tenu par le salarié sous la responsabilité de l’employeur ; que le supérieur hiérarchique du salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours assure le suivi régulier de l’organisation du travail de l’intéressé et de sa charge de travail ; qu’en outre, le salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours bénéficie, chaque année, d’un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l’organisation et la charge de travail de l’intéressé et l’amplitude de ses journées d’activité ; que cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé. »
Dès lors, il est permis de penser que, sans imposer formellement aux partenaires sociaux de négocier leur accord collectif en parfaite conformité avec celui de la métallurgie, celui-ci pourrait servir de « référence » dans la conduite des prochaines négociations afin de s’assurer que l’accord ne pourra faire l’objet d’une censure de la Cour de cassation.
II. La sanction de la méconnaissance par l’employeur de ses obligations de suivi et de contrôle dans l’exécution de la convention de forfait- jours
L’arrêt commenté apporte une contribution considérable à la question de l’application des conventions de forfait-jours en ce sens qu’il pose une nouvelle sanction à la méconnaissance par l’employeur de son obligation d’assurer un contrôle efficace dans l’exécution du forfait-jours, contrairement à la position jurisprudentielle antérieure.
En effet, la Cour de cassation avait adopté une position contraire dans les précédentes décisions rendues par la chambre sociale, et notamment dans celle du 13 janvier 2010 , par laquelle il a été jugé, au visa du même article L.3121-45 du Code du travail toujours dans sa rédaction antérieure à la loi du 22 aout 2008, que « si le défaut d'exécution par l'employeur de cette stipulation conventionnelle ne met pas en cause la validité de la convention de forfait en jours, il ouvre cependant droit à des dommages et intérêts au profit du salarié. »
Ainsi, le non respect par l’employeur des dispositions de la convention collective n’avait pas de conséquence sur la validité ou l’efficacité du forfait-jours, ouvrant seulement droit à des indemnités pour le salarié, mais non au paiement des heures supplémentaires effectuées.
Or, la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence comme elle l’indique elle-même dans son communiqué, et décide à présent que le manquement de l’employeur à ses obligations de suivi et de contrôle de l’exécution du forfait-jours, « prive d’effet » la convention de forfait-jours. Dès lors, le salarié est en droit de réclamer le paiement des heures supplémentaires effectuées au delà de la durée légale du travail.
En effet, la Cour de cassation avait adopté une position contraire dans les précédentes décisions rendues par la chambre sociale, et notamment dans celle du 13 janvier 2010 , par laquelle il a été jugé, au visa du même article L.3121-45 du Code du travail toujours dans sa rédaction antérieure à la loi du 22 aout 2008, que « si le défaut d'exécution par l'employeur de cette stipulation conventionnelle ne met pas en cause la validité de la convention de forfait en jours, il ouvre cependant droit à des dommages et intérêts au profit du salarié. »
Ainsi, le non respect par l’employeur des dispositions de la convention collective n’avait pas de conséquence sur la validité ou l’efficacité du forfait-jours, ouvrant seulement droit à des indemnités pour le salarié, mais non au paiement des heures supplémentaires effectuées.
Or, la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence comme elle l’indique elle-même dans son communiqué, et décide à présent que le manquement de l’employeur à ses obligations de suivi et de contrôle de l’exécution du forfait-jours, « prive d’effet » la convention de forfait-jours. Dès lors, le salarié est en droit de réclamer le paiement des heures supplémentaires effectuées au delà de la durée légale du travail.